Kyoto | Le Musée Raku

Kyoto | Le Musée Raku
21/01/2019 MCT
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A Kyoto, le musée Raku est dédié à ces céramiques reconnaissables au charme de leur plis naturels, irréguliers parfois accidentés, et à leur texture à la fois douce, solide et terrienne.

Tout premier contact charnel avec le matcha passe par le chawan (茶碗, bol de thé). Ceux de style Raku (楽焼, littéralement « cuisson confortable ») sont appréciés pour leur aspect dépouillé, leur « simplicité tranquille, sans prétention » (Dominique Buisson, Esthétiques du quotidien au Japon).

Devant la sobre et élégante bâtisse du musée, une longue palissade annonce un saut vers le 16e siècle.

 

Kyoto_Raku_Museum_Wooden_Palisade

Tanaka Chōjirō, figure fondatrice du Raku

Ameya, potier originaire du Fujian dans le sud de la Chine, émigre au Japon entre le 15e et le 16e siècle. Il emporte avec lui la technique prisée sous les Ming des porcelaines aux trois couleurs (susancai en chinois, sosancai en japonais).

Son fils, Chōjirō, figure fondatrice du Raku, est tout d’abord décorateur de tuiles. Il devient céramiste d’ustensiles de thé à la faveur de sa rencontre avec Sen no Rikyu (1522 – 1591). Il crée les premiers chawan destinés à accompagner les séances de chanoyu du fameux maître de thé.

Raku et Wabicha

La singularité du style Raku tient à l’intention de Chōjirō qui restera intacte tout au long de sa vie : créer des céramiques exclusivement destinées aux cérémonies de Sen no Rikyu. L’amitié entre les deux hommes se traduit par des créations qui occupent une place inégalée, tant dans l’histoire de la porcelaine japonaise que dans celle du chanoyu.

De fait, le style Raku est intimement lié à l’art du thé, et plus particulièrement à l’esthétique wabi-sabi qu’affectionnait Sen no Rikyu : simplicité, rusticité, beauté volontairement imparfaite. La modestie des ustensiles et le dépouillement du rituel constituent l’essence du wabi-cha selon le Maître.

Raku_Rika_©Raku_Museum_Kyoto

Chawan Raku, “Rika”, ©Raku_Museum_Kyoto

Une tradition vivace de plus de 400 ans

Depuis le 16e siècle, les céramistes de la lignée Raku transmettent et renouvellent l’art de cette céramique dite à basse température, entièrement manuelle qui s’exécute sans tour de potier.

Sa généalogie révèle l’importance du clan de Tanaka Sokei (né autour de 1535) dont la petite-fille épouse Chōjirō. Lorsque ce dernier disparaît (en 1589 ou 1590), il revient au clan Tanaka de poursuivre son œuvre. Un art qui se réinvente depuis plus de 400 ans en respectant l’esprit de son fondateur.

Transmission de l’imayaki

Au fil des générations, la transmission des techniques propres au style Raku se passe toujours de père en fils. Une fois les fondamentaux acquis, chacun forge sa propre voie artistique. Cela passe par un long apprentissage à l’étranger dans les beaux-arts. Le successeur revient ensuite vers le Raku en proposant une création qui lui appartient.

Raku_Joka_©Raku_Museum_Kyoto

Chawan Raku, “Joka”, ©Raku_Museum_Kyoto

Elle doit répondre à l’exigence de l’imayaki, littéralement « les bols issus du four aujourd’hui » : s’inscrire dans la tradition et s’en détacher par une proposition personnelle qui répond aux aspirations spirituelles, sociales, culturelles, contemporaines.

Ainsi, Kichizaemon XV, né en 1949 et nommé Maître Raku en 1980 à la disparition de son père, s’attache à transcender les contraires : ordinaire et extraordinaire, passé et présent, artifice et hasard, réalité et fiction, lumière et obscurité, vie et mort.

Le chawan qu’il façonne en 1983 baptisé Kasen (« Esprit de la fleur »), pâle teinte cuivrée et ample rondeur, évoque Otogoze (« Joues rebondies »), une création du 17e siècle. Cependant, quelques signes l’en distinguent : la mosaïque de ses fines craquelures, l’absence de pied et la caresse d’une spatule biseautée sur le côté.

Progresser entre les chawan, calligraphies et ukiyo-e de la collection permanente revient donc à voyager à travers les âges au croisement de deux arts, la céramique et le chanoyu. Ce cheminement dans le temps témoigne avant tout d’un constant renouvellement de la quintessence japonaise face au monde.

Pourquoi le musée Raku ?

Ce musée retrace les origines de cette technique de céramique tout à fait unique.

Informations pratiques

. Adresse. 〒602-0923 Kyoto Prefecture, Kyoto, Kamigyo Ward, 油小路通一条下る

. Horaires d’ouverture. Tous les jours de 10h à 16h. Fermé le lundi.

. Le musée se visite en une heure minimum et en chaussettes.

. Les photos à l’intérieur sont interdites.

. Ouvrages et revues sont disponibles pour consultation et achat dans une salle de lecture claire et spacieuse.

. Visiter le site web du musée Raku de Kyoto