Voyager depuis une tasse : les thés « Indication Géographique » de Komaen vus par Carine Baudry

A l’occasion d’une rencontre en juin 2024 avec les producteurs de la Komaen Tea Promotion Association (Laos), nous avons échangé avec Carine Baudry, aromaticienne, expert-dégustateur chez La QuintEssence et présidente du jury thé de l’AVPA, qui nous a présenté les profils aromatiques de ces thés laotiens « Indication Géographique ».

TeaVoyages.com. Quels sont ces thés de Komaen reconnus par une Indication Géographique et quelles sont leurs particularités gustatives  ?

Carine Baudry. Nous avons tout d’abord ce qu’on appelle les puerh verts, qui entrent dans la catégorie des thés verts séchés au soleil.

Selon la saison de la récolte, ce thé sera plus ou moins minéral, tout en étant dans un registre zesté aux notes légèrement confites, de pâte de coing ou de pâte de poire, avec une note de fruit blanc à l’intérieur.

Ces thés offrent une belle présence et une belle structure en bouche. Ce qui les distingue tient à ce que l’on pourrait appeler leur résonance, leur profondeur, leur fraîcheur. Ce n’est ni une note, ni une texture en particulier, mais plutôt une sensation, presque de pseudo chaleur. Nous sommes sur quelque chose qui devient frais, très profond en persistance et donne une impression très intéressante. En somme, avec ces thés puerh et ces thés verts séchés au soleil, nous sommes dans quelque chose de minéral, métallique, entre fruits frais, compotés et agrumes.

Qu’en est-il des thés noirs ?

C. B. Du côté des thés noirs, on retrouve leur charpente, leur rondeur sur un registre malté, un peu épicé parfois, légèrement cuit, avec des notes miellées, chocolatées. Nous avons également cette profondeur et cette présence, selon l’âge du théier.

Ce sont des thés riches en parfum, avec des notes franches, une bonne présence en bouche et de la profondeur.

 

Quelles associations pouvons-nous imaginer en termes d’accords mets – thés ?

C. B. On peut vraiment s’amuser. Nous sortons de table d’un restaurant étoilé qui l’a bien compris. Je dirais, de manière globale, que

le thé noir peut être très intéressant avec des légumes un peu rôtis, un peu grillés, que l’on fait revenir dans une sauce au soja. Il s’accordera très bien aussi avec par exemple une tarte tatin, un tiramisu ou une viande.

Le puerh vert sera intéressant avec une viande blanche, un comté jeune ou un fromage de chèvre.

Comme il a une certaine charpente, il contrebalance bien des plats qui comportent un peu de gras, comme par exemple un risotto asperges, avec la rondeur du riz et du parmesan, le tout relevé d’une bonne huile d’olive, comme celles médaillées par l’Agence de Valorisation des Produits Agricoles !

Finalement, quel intérêt des amateurs français peuvent-ils trouver dans ces thés ?

C. B. Osez explorer des terroirs moins connus, dont on a moins l’habitude. Certains thés sont dans la finesse, l’élégance, la douceur.

Nous avons là des thés qui sont plus bruts, mais telle est précisément leur qualité. Leur terroir ouvre vers quelque chose de plus authentique, de plus antique.

Ces thés touchent à d’autres concepts de dégustation : fraîcheur, profondeur, résonance. Bien qu’on les retrouve également dans des puerh classiques, cela mérite d’être réexploré.

Avant même de partir au Laos, ces thés nous emmènent en voyage et nous met au contact de cette histoire, de ce terroir, de ces personnes. En y prêtant attention, du fond de la tasse, cela se sent.

En savoir plus

Lire l’interview de Manichanh Pankeo, Vice-Présidente de la Komaen Tea Promotion Association, qui offre un premier aperçu du thé au Laos

Lire notre échange avec Delphine Ayerbe (GRET) et Jean-Marie Brun (ARTE-FACT Development) sur la démarche Indication Géographique appliquée aux thés de Komaen

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